MAÍZ MAÏS. Les tribulations d’une graine voyageuse.

Céréale originaire du Mexique où il est cultivé et consommé depuis plus de cinq mille ans, le centeotl est connu chez nous sous le nom de téocinte, ancêtre domestiqué du maïs. Dans le panthéon aztèque, Centeotl est le dieu du maïs alors qu’Ah Mun et Yum Kax sont célébrés par les Mayas. Leur culte et leurs représentations sont multiples.

Lorsque Christophe Colomb arriva, en 1492, sur l’île d’Hispaniola (Haïti et République dominicaine), les Taïnos cultivaient une plante qu’ils nommaient mahiz. Le nom est resté, mémoire d’une culture pratiquement disparue dès le XVIème siècle, celle du groupe indien taïno. Les conquistadors découvriront aussi que, bien avant leur arrivée, le maïs s’était répandu de la Mésoamérique vers le nord et vers le sud du continent américain. Son adaptabilité et sa diversité génétique ont favorisé sa propagation et le prédisposaient déjà à conquérir le monde.

Jadis, base nutritionnelle et économique des civilisations précolombiennes, il reste aujourd’hui, la nourriture première du Mexique et de l’Amérique centrale. Tortillas, pupusas, arepas, palomitas, canguil, cachapas, pozole, mazamorra, chicha, chulpi, morocho, humitas, champus, chochoca, atole, tamales… la liste est longue des aliments faits de maïs.

Si on le nomme encore mahi en créole de Louisiane ou de la Réunion, blé de Turquie ou des Indes ailleurs, et même turquis dans la région bressane, l’appellation de maïs et sa consommation, sont désormais mondiales. En France, c’est la généralisation de la culture du blé dans la seconde partie du XXème siècle qui a contribué à la disparition de la consommation humaine de maïs. La cruchade et le millas du Sud-Ouest sont les témoins d’une époque révolue alors que le taloa basque a été localement remis au goût du jour aux côtés du pop-corn, du pain de maïs et du maïs doux introduit en France dans les années 70.

Le maïs se conjugue autour de huit espèces : le maïs dur, le maïs farineux, le maïs cireux, le maïs doux, le maïs pop-corn, le maïs denté, le maïs corné et le maïs velu. Le Mexique revendique une soixantaine de variétés, natives en majorité, et l’Amérique latine, 220. L’hybridation et la manipulation génétique ont fait exploser le nombre de variétés aujourd’hui proposées, tel le MON810 (interdit en France) de Monsanto. L’accord de libre-échange nord-américain (ALENA) a mis fin, en 2008, aux taxes douanières sur les grains. Depuis, le maïs étatsunien et sa farine ont envahi le Mexique, réduisant les paysans à abandonner leur milpa (champ de cultures traditionnelles, maïs, courge, haricot, piments), les poussant vers les villes ou la migration vers le nord, et aggravant la malnutrition.

En France, principal exportateur européen, la culture du maïs pour les animaux a envahi de nombreuses régions, polluant, appauvrissant et asséchant les sols. Contre ces dérives que nous refusons, pour préserver la biodiversité et la culture des espèces anciennes dont la valeur nutritive a permis la survie de nombreuses populations, nous vous proposons, pour cette nouvelle exposition, de questionner le monde, de rêver de résister, en vous emparant du thème du maïs, première culture du monde, de ces épis aux graines blanches, jaunes, translucides, rouges, multicolores, noires, violettes, témoins et victimes des évolutions de la planète.

Catalogue de l'exposition réalisé par Cécile RENAUT
Affiche de l'exposition réalisée par Suemi YARELI, Françoise CONSTANTIN & Denis JAUBERT